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La confession fait-elle partie du bouddhisme ?

Le pratiquant bouddhiste se confesse-t-il ? Oui, évidemment. La confession est une pratique importante et saine. Les mérites qu’accorde la confession sont merveilleux. C’est en outre une pratique importante pour éviter d’entretenir nos mauvais karmas.


La confession est l’une des sept offrandes au Bouddha. La première de ces offrandes consiste dans le fait de saluer le Bouddha, la seconde, dans le fait de lui donner des fleurs ou de la nourriture. La troisième est la confession proprement dite, la quatrième propose d’accompagner quelqu’un ou de partager des choses avec lui. La cinquième consiste à savoir conseiller les gens, la sixième, à émettre un grand vœu par rapport à la pratique, et la septième enfin, à retourner les bénéfices de notre pratique. Ces sept offrandes sont généralement liées et il est très fréquent qu’un grand bodhisattva les réalise en même temps.
Il existe deux manières d’entendre le terme de confession. Se confesser, c’est d’abord reconnaître sans hypocrisie ce que nous avons fait. Mais c’est aussi un acte de contrition. Quiconque pratique ainsi la confession, a dit le Bouddha, en reçoit d’infinis mérites. Dans le sutra fu wei shou jia zhangzhe shuo yebao chabie jing (佛爲首迦長者說業報差別經), le Bouddha a expliqué que si le cœur de quelqu’un est empoisonné par de très grands péchés, la confession a le pouvoir d’arracher la racine de son mauvais karma.
Être parfaitement honnête vis-à-vis de nous-mêmes et de nos péchés, et exprimer la volonté sincère de nous en amender, voilà les deux points essentiels que nous devons respecter au moment de nous confesser. Cependant les êtres humains que nous sommes portent en eux, depuis d’incalculables kalpas, de très considérables karmas positifs et négatifs. La vie est faite de telle manière qu’elle permet la manifestation de nombreux mauvais karmas, qui deviennent alors des obstacles à notre existence.

Pour les bodhisattvas, ces obstacles sont néanmoins une voie privilégiée vers le progrès. Un bodhisattva peut observer la manière dont se forme un mauvais karma. Il considère son comportement, sa pensée, sa parole, et il sait que ces trois moyens d’expression de l’homme contribuent à la formation d’un fruit karmique. Or, sitôt qu’un bodhisattva réalise qu’il est en train de former une mauvaise action, immédiatement il se confesse. Par conséquent, même s’il a favorisé l’émergence de mauvais karmas, il peut malgré tout réaliser de bonnes actions. Ainsi s’ouvre-t-il de plus en plus à la sagesse. Par le moyen de la confession, il peut transformer ses fruits karmiques négatifs, renforçant la qualité de ses relations, de ses affinités avec les gens qui l’entourent et, plus tard, conduire toutes ces personnes sur la Terre de bouddha.
Il existe cinquante-deux étapes dans la pratique. Avant d’accéder au deuxième bhumi de bodhisattva, le pratiquant est encore accablé d’un certain nombre de mauvaises habitudes. Il peut encore commettre beaucoup d’erreurs et échouer à respecter les préceptes. Ceci est tout à fait normal, mais le plus important pour un pratiquant qui veut corriger ses erreurs est d’être capable de se confesser.

Il est très difficile de respecter les préceptes durant les innombrables kalpas de la pratique, si bien que le pratiquant éprouve le besoin fréquent de se confesser et de se rattacher aux préceptes, ce qui lui permet de cumuler de bonnes actions. Le courage de reconnaître ses fautes et la volonté de les corriger sont pareils à deux bijoux que porterait un bodhisattva à ses oreilles et qui feraient de lui aux yeux d’autrui un auguste personnage. C’est ainsi que procède un pratiquant qui, d’une vie à l’autre, évolue vers plus de sagesse. Ces deux aspects de la confession sont inséparables et constituent des pratiques très saines.

Prenons à présent pour illustrer nos propos un passage du chapitre XVII du Mahāyāna Mahāparinirvāṇa Sūtra.

Le bodhisattva Jivaka eut un jour une conversation avec le roi Ajatashatru :

« Noble seigneur, vous êtes roi, pourtant vous êtes à l’origine de nombreux péchés. Prenez l’habitude de vous confesser.

Noble seigneur, le maître Bouddha a dit que deux types d’actions pouvaient venir en aide à quelqu’un. La première consiste à reconnaître ses torts, la seconde à éviter de reproduire ces mêmes mauvaises actions. Le fait de reconnaître ses torts encourage autrui à ne pas les produire à leur tour. Le fait de nous sentir honteux vis-à-vis de nos fautes est en lien avec nous-mêmes, avec notre intériorité, cependant que le fait de savoir reconnaître ses torts exerce une influence sur le monde extérieur. La honte vient de la peur que les gens apprennent notre faute. En apprenant à nous confesser et à ne pas reproduire nos anciennes erreurs, nous apportons des bénéfices au monde extérieur et jusqu’au ciel même. La confession agit donc bien sur notre intériorité autant que sur le monde extérieur.

Celui qui ne sait pas se confesser perd sa dignité d’être humain. Il revient à une conscience animale. Celui en revanche qui sait se confesser sait aussi respecter sa famille et son maître. Il entretient avec sa famille de bonnes relations. Vous qui êtes roi, qui venez de vous confesser à moi, vous savez désormais comment pratiquer la confession. Vous en avez passé l’épreuve avec succès.

Ecoutez-moi, ô roi. Le maître Bouddha a dit : il existe deux types de personnes de très grande sagesse. Le premier type concerne ceux qui savent se confesser, le second réunit ceux qui n’ont plus de mauvais karma. De même, il existe deux types d’hommes ignorants : ceux qui commettent de mauvaises actions, et ceux qui les cachent. Ô roi, vous qui avez commis du mal par le passé, votre confession vous a rendu capable de ne plus le reproduire. Votre confession est comparable au fait de déposer dans une eau souillée une pierre précieuse : la lumière de la pierre disperse ses rayons dans l’eau impure. Elle est encore comparable à la lune que dissimulent les nuages amoncelés. Lorsque les nuages se dissipent, les rayons de la lune se répandent sur la terre. Ainsi peut-on comparer une personne qui sait se confesser : elle peut se purger de tous ses mauvais karmas et revenir à un état de pureté, d’innocence originelle.

Un bodhisattva met en exercice ces deux attitudes positives, ce qui lui apporte plus de grandeur et l’aide à poursuivre le chemin qui le conduira à la bouddhéité. De surcroît, il est essentiel de croire dans les vertus de la confession et dans les innombrables mérites qu’elle offre.
Le sutra Decheng ben sheng xindi guan jing (大乘本生心地觀經) présente deux manières de se confesser. La première consiste dans la pratique elle-même : le pratiquant observe sa pensée, sa parole et son comportement et peut ainsi corriger ses karmas négatifs. La seconde consiste à étudier les sutras, apprenant ainsi à comprendre ce qui est juste et à corriger, là également, les karmas négatifs.

Le sutra apporte des explications détaillées sur cette question. Concernant tout d’abord la méthode consistant dans la pratique, il apporte les précisions suivantes : si une personne est à l’origine d’une action très grave, il lui est recommandé de faire face à un public d’au moins trois personnes, une statue du Bouddha installée en outre derrière lui. C’est alors qu’elle doit confesser très clairement la mauvaise action qu’elle a commise, ce qui lui procurera la force de corriger son mauvais karma. Si, maintenant, une personne a commis une action d’une gravité relative, le pratiquant doit se placer devant une personne au moins, une statue du Bouddha également derrière lui. Si, enfin, une personne a commis une action bénigne, il lui suffit de se confesser devant une statue du Bouddha.

Mais, dans tous les cas de figure, le pratiquant doit s’engager à ne plus reproduire ce type d’action. Ainsi pourra-t-il obtenir de sa confession tous les mérites qui s’y rattachent, car il se sera efforcé de modifier la tournure de son esprit.
Par ailleurs, l’effort que nous pouvons fournir pour respecter l’enseignement du Bouddha est une autre manière d’accumuler des mérites karmiques. Un grand bodhisattva du nom de Vasubandhu illustra un jour le concept de confession d’une façon particulièrement édifiante. Il avait nié, à une certaine époque, l’enseignement du Bouddha. Mais, saisi d’abord de honte et de pensées suicidaires, il préféra cependant se confesser et laissa derrière lui beaucoup d’écrits dans lesquels il expliqua quelles erreurs d’interprétation il avait faites, afin d’éviter que d’autres individus après lui ne se heurtent aux mêmes écueils.

Le second chapitre du Brahmajala sutra nous informe que si, au moment de se confesser au Bouddha et de lui offrir un don, nous sommes en mesure de le voir, tous nos plus lourds karmas seront dissipés. Toutefois, si le Bouddha ne nous apparait pas, nous devrons poursuivre avec opiniâtreté jusqu’à le percevoir.
Il nous est loisible aussi de nous confesser auprès de quatre-vingt-huit bouddhas, ou encore des trois mille ou des dix-mille bouddhas. Ce faisant, nous pouvons corriger tous nos mauvais karmas.
Les gens qui se confessent sont mus généralement par une authentique sincérité. Cette sincérité est semblable à un canal grâce auquel la communication avec le Bouddha est accessible. Le Bouddha devient alors témoin de la confession. C’est ainsi que celui qui se confesse sincèrement est résolu à changer intérieurement, et il est très probable ensuite qu’il veuille émettre l’un ou plusieurs des vœux des bodhisattvas. Or, c’est un fait qu’un bodhisattva souhaite vivement aider les autres, de quoi on peut déduire finalement que la personne qui se confesse sera assurément engagée dans une démarche profondément altruiste. Ainsi stimulée par ce mouvement de compassion, il est certain qu’elle recevra une aide du Bouddha.
Arrêtons-nous là concernant la partie pratique de la confession, afin de nous intéresser à une autre forme de confession : la confession par le raisonnement, qui est réservée uniquement aux personnes illuminées. La question est de savoir comment un être illuminé est en mesure d’effectuer cette confession. Sa confession met son véritable moi à contribution. C’est pourquoi on parle de cette confession en termes de « confession de la réalité ». Le mot « réalité » sous-entend que le pratiquant accède à la réalité du monde. La personne illuminée passe à travers son vrai moi pour se confesser. Mais l’illumination, insistons là-dessus, est une condition impérative à la réalisation de ce type de confession. Quelqu’un qui a une connaissance approfondie du bouddhisme ne peut pas se confesser de cette manière. Sa confession serait incomplète et impure. Une personne peut bien se croire illuminée, si elle ne l’est pas, ce type de confession lui restera inabordable.
Pourquoi un bodhisattva illuminé peut-il alors y réussir ? Parce qu’il sait qu’il n’est nullement limité par les trois mondes, ni par aucune des fonctionnalités de la nature humaine. Il est conscient de n’avoir pas, dans son essence, d’apparence, il est conscient d’être pur, propre et éternel. Il est au-delà du bien et du mal. Le fait de maintenir ou de violer les préceptes n’a pas de sens à ses yeux. La « confession de la réalité », n’est rien de moins que la compréhension de ces vérités.

Pourquoi cette confession purifie-t-elle tous les mauvais karmas ? Le vrai moi ne conçoit pas l’idée de respecter ou de violer les préceptes, ce qui signifie que le concept d’erreur lui est étranger. Un être illuminé peut ainsi se saisir de son vrai moi pour réaliser par son biais sa confession, attendu que son vrai moi est pur, dépourvu de toute capacité de commettre des erreurs. Il sait en outre que les cinq agrégats et les six vijñāna ne sont pas le vrai moi.
Ses mauvais fruits karmiques se présenteront cependant dans des vies futures ; mais puisqu’il se sera confessé à travers son tathagatagarbha, il pourra très rapidement corriger leurs manifestations et évoluer dans sa pratique. Les mauvais karmas, au moment de se présenter, deviendront alors, non plus des obstacles, mais des forces positives qui, à terme, aboutiront au développement de nombreux mérites karmiques. C’est la raison pour laquelle la « confession de la réalité » est extrêmement bénéfique, d’autant plus, bien entendu, que cela retient d’autres mauvaises graines de germer en lui. Voilà qui explique le sens de l’expression « confession de la réalité ».

Da-Hui (大慧) parle lui-même de cette confession en termes de confession de la réalité, ajoutant quant à lui qu’elle permet d’atteindre plus vite à la bouddhéité. La confession équivaudrait selon lui à réaliser 20/30èmes des dix-mille actions des six paramitas. Un bodhisattva illuminé exploite cette forme de confession pour cultiver sa générosité et consolider ses bonnes affinités karmiques avec les êtres sensibles. Tout ceci sous-entend que l’illumination est la clé de la pratique des bodhisattvas.
Si une personne prétendument illuminée demeure engluée dans ses mauvaises habitudes et ne renonce pas à sa vision erronée, même si elle connaît le secret du tathagatagarbha [1], elle ne pourra jamais l’exploiter à des fins de confession. Elle ne verra jamais le monde à travers l’œil de son vrai moi et ne mérite pas sa connaissance du vrai moi, si bien que sa confession ne lui conférera aucun mérite. Si quelqu’un lui a révélé la nature du vrai moi, elle n’en tirera pas le moindre mérite et ne se délestera pas de sa vision erronée. Son attachement à ses mauvaises habitudes ne sera en rien déraciné.
Pour que ce type de confession fonctionne réellement, une illumination authentique est indispensable. C’est à travers son tathagatagarbha seul en effet que le pratiquant peut regarder le monde et transformer positivement des graines karmiques négatives. Il est certain par ailleurs qu’un maître, après qu’il a été illuminé, va continuer de suivre l’enseignement du Bouddha et s’efforcera de dissiper les illusions des gens. Ce type d’action constitue une forme de confession pour les bodhisattvas illuminés qui, s’ils n’y parviennent pas, ont devoir de se confesser.
Après son illumination, le bodhisattva doit pratiquer les dix mille actions issues des six paramitas. Un bodhisattva illuminé met toute son énergie à pratiquer ces actes vertueux qui représentent un aspect de la confession. Un bodhisattva montre une puissante volonté et une persévérance qu’il n’abandonnera pas durant les trois prochains kalpa. Le grand bodhisattva Samantabhadra par exemple avait émis un vœu considérable : celui d’agir avec sagesse en tous lieux et en tous temps, persévérant aussi longtemps qu’il le faudrait pour atteindre la bouddhéité.

Telle est la nature de la confession de la réalité. Celui qui n’a pas le niveau requis et qui, pourtant, soutient pouvoir réaliser ce type de confession, viole tout simplement les préceptes bouddhistes. Il ment à seule fin de profiter de la crédulité des gens, et son esprit est soumis à une vision erronée. N’ayant aucun des mérites qu’offre une confession véritable, il devra en outre rembourser plus tard des dettes karmiques négatives. Une personne illuminée peut bien encore commettre des erreurs, mais lorsqu’elle se confesse, c’est avec sincérité. Elle n’ignore pas que ses mauvaises habitudes doivent être corrigées et que son vrai moi est au-delà du bien et du mal. Elle n’oublie pas non plus qu’elle devra acquérir une maîtrise de ses pensées, de ses paroles et de son comportement, si elle veut se rapprocher au plus près de l’enseignement du Bouddha. Telle est la juste attitude que doit adopter un pratiquant.

Si quelqu’un n’est pas encore illuminé, qu’il écoute le véritable enseignement du Bouddha et s’approche ainsi peu à peu de la connaissance qui ouvre les portes de la sagesse. La réflexion suit l’écoute et apporte déjà certains mérites, car elle sème en soi-même des graines karmiques positives sur le chemin de la sagesse ou de la libération. Ainsi commencera-t-il de suivre la pratique bouddhiste et d’exécuter les dix-mille actions issues des six paramitas. Sans doute même arrivera-t-il à l’illumination et à effectuer la confession de la réalité, puis, très progressivement, à se réaliser en tant que Bouddha.
En outre, le fait de participer aux cérémonies bouddhistes fait partie de la pratique, mais ce n’est pas suffisant : il faut surtout être capable d’accomplir la confession de la réalité, sans quoi aucun mérite ne peut être retiré des cérémonies.
Au reste, la confession ne consiste pas seulement dans le fait de reconnaître nos mauvaises actions. Il faut avoir aussi le courage et la volonté de ne plus les reproduire. Les bodhisattvas eux-mêmes ont commis beaucoup d’erreurs dans leurs vies passées et dans leur vie présente. Il faut néanmoins continuer de pratiquer, sachant que la confession est pour cela une aide, une force. C’est de cette manière qu’un bodhisattva apprend à demeurer dans la voie de l’enseignement du Bouddha, dont il diffusera à tous les êtres sensibles la parole. Ainsi sont les vrais disciples du Bouddha, dont la vie s’offre à la vision juste.

Une chose encore : ne culpabilisez pas. Si vous être rongés de regrets ou de remords, que vous gardiez en vous obstinément cette image négative du mal que vous avez causé, votre confession manquera de sincérité. La confession est un moyen efficace de transformer nos pensées, nos paroles et nos actions, et d’entretenir une vision et des pensées justes. L’une des clés de la confession est donc bien de ne pas se sentir coupable.

Beaucoup de gens par ailleurs se confessent sans trop savoir comment s’y prendre. Un bodhisattva quant à lui sait comment, par la confession, purifier ses propres karmas négatifs et distribuer des énergies positives à ses amis et ses ennemis. Il agit pour que tout un chacun plus tard devienne un bouddha. C’est pourquoi le bouddhisme, non seulement croit en la confession, mais l’impose comme un moyen de s’engager à changer, un moyen pour que les mauvais karmas de celui qui se confesse soient transformés positivement. Un bodhisattva peut avoir commis de nombreuses mauvaises actions, il saura faire les efforts nécessaires pour s’en amender. Vasubandhu par exemple avait abondamment décrié l’école du Mahāyāna, mais en se confessant, il sut se corriger et conduire un grand nombre de personnes vers la pratique de cette école. Vasubandhu est un bon exemple à suivre. Alors, oui, le bouddhisme croit aux vertus de la confession, et il l’utilise en tant qu’elle apporte à celui qui la pratique d’innombrables mérites.

Nous achevons ici notre conférence, faute de temps.

Merci d’avoir pris le temps de la suivre, merci de votre présence.

Amitofo.

[1] Si, par exemple, quelqu’un le lui a révélé sans qu’elle l’ait cherché par elle-même.