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L’esprit qui ne s’attache jamais à rien


Vimalakirti Nirdesa Sutra :

« “Sans aucun attachement aux entrées”, tel est le cœur de bodhi, en raison de l’absence d’avidité et d’attachement.

‘’Être en accord’’, voilà qui définit le cœur de bodhi, qui en accord avec l’ainsité. »

Remarques :

« “Sans aucun attachement aux entrées”, tel est le cœur de bodhi en raison de l’absence d’avidité et d’attachement. »

Notre manas[1] et notre conscience mentale[2] sont liées aux six entrées[3] (S : ṣaḍāyatana).

En d’autres termes, notre manas réagit aux dharmas (objets mentaux), et notre conscience mentale, qui nous permet d’être conscients, se base sur les six objets de conscience pour pouvoir fonctionner. En raison de la présence de ces six entrées et des objets des sens correspondants[4], l’avidité et l’attachement se manifestent. Par exemple, ces entrées peuvent provoquer le désir de vacances ou d’acheter une voiture. D’un autre côté, nous ne voudrons pas nous lancer dans de telles entreprises sans les six objets des sens. Si les six objets des sens n’existaient pas du tout, combien de temps pourrions-nous supporter cette situation sans vouloir en sortir ? Ce n’est pas par hasard si les Américains ont utilisé la privation sensorielle comme une torture psychologique. De plus, voudrions-nous rester dans un état où nous n’avons aucune sensation simple, comme la douleur, la démangeaison ou la fatigue ? Bien sûr que non, car nous, les êtres sensibles, sommes fermement attachés aux sensations dérivées de nos cinq entrées sensorielles En effet, c’est le manas qui s’attache aux cinq entrées sensorielles – manas étant lui-même une entrée.

À cette fin, l’esprit qui s’attache aux cinq entrées sensorielles et dont l’avidité, par là même, se développe, ne peut être dans l’état de bodhi et n’est donc pas le cœur de bodhi. Ce n’est que lorsque l’on découvre l’esprit qui ne s’attache pas aux six entrées sensorielles et ne les convoite pas que l’on peut être qualifié d’éveillé au véritable cœur de bodhi (bodhicitta). Cela signifie qu’on est illuminés. La nature intrinsèque du cœur de bodhi est de ne pas désirer et de ne pas s’attacher à un état quelconque des six objets des sens. Par conséquent, ce cœur de bodhi peut vraiment être distant des six objets des sens et ne montrer aucun signe d’avidité.

« ‘’Être en accord’’, voilà ce qui définit le cœur de bodhi, qui est en accord avec l’ainsité. »

L’esprit qui remplit la condition ci-dessus est le cœur de bodhi. Mais qu’est-ce donc une « ainsité » ? En fait, une ainsité perçoit les phénomènes tels qu’ils sont. Or, nous ne voyons jamais les choses telles quelles sont. Par conséquent, nous nous y attachons, ce qui fait monter l’avidité et crée des soucis. En revanche, le cœur de bodhi, appelé aussi vrai moi, ne possède pas la moindre avidité ou le moindre attachement à tous les états des six objets des sens dans les trois mondes. Le cœur de bodhi ne discerne pas du tout les six objets des sens et est donc « en accord avec l’ainsité ».

En effet, l’avidité entraîne naturellement les cinq sensations que sont la souffrance, la joie, le chagrin, le bonheur et l’indifférence. Tout ceci concerne notre esprit de tous les jours, la conscience mentale, qui a des préférences par rapport à ces états et qui disparait dans certains cas. Il est clair qu’elle n’est pas une ainsité qui, par définition, n’a jamais aucune sensation et aucune préférence. Par conséquent, seul un type d’esprit – tathagatagarbha – est en accord avec l’ainsité.

Le cœur de bodhi, tathagatagarbha, est un esprit qui ne voit pas, n’entend pas, ne ressent pas et ne connaît pas. Il est détaché de toutes ces fonctions perceptives. Il ne différencie pas et existe en permanence. D’un autre côté, notre conscience mentale réagit aux six entrées, elle est attachée à toutes les fonctions perceptives : fonctions de la vue, de l’ouïe, du ressenti et de la connaissance. Ce n’est donc pas la véritable bodhicitta. Par conséquent, seul l’esprit qui peut être en accord permanent avec l’ainsité est le véritable cœur de bodhi.

Pour recapituler en une phrase, l’ainsité signifie qu’elle perçoit et montre telles quelles toutes choses, et le cœur de bodhi est en accord avec l’ainsité dans le sens où il fait apparaitre les fruits karmiques tels quels, sans aucune préférence. En effet, nous pouvons dire que le cœur de bodhi est ainsité.


[1] La septième conscience que certains appellent aussi la « faculté mentale ».

[2] La sixième conscience.

[3] Œil, oreille, nez, langue, corps, manas.

[4] Forme, son, odeur, saveur, contact, dharma (objet mental).