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Pourquoi Devadatta jeta un jour une pierre au Bouddha

佛說地婆達兜擲石緣經
(Fu shuo di po da dou zhi shi yuan jing)

Selon ce que j’ai entendu, le Bouddha était entouré de cinq cents grands arhats dans le palais du roi Anavatapta, non loin d’une source thermale. A l’exception d’Ananda , tous les auditeurs étaient de grands arhats pourvus des six pouvoirs surnaturels.
Le Bouddha adressa alors la parole à Sariputra. Il lui confia d’abord que, dans un temps fort reculé, il existait une ville dénommée Rāja-gṛha, dans laquelle vivait la famille Xu tan dont le père était extrêmement fortuné. Sa propriété était d’ailleurs remplie d’or et de pierreries, et elle comptait de nombreux animaux et une foule d’esclaves qui travaillaient à son service.

Le jour de sa mort, cet homme laissa un héritage conséquent à ses enfants. Il avait un fils, Sumati, qui avait lui-même un demi-frère prénommé Xiu ye she. Or, Sumati, qui voulait conserver pour lui seul tout son argent, se demanda de quelle manière il pouvait se débarrasser de son frère. Il proposa donc à Xiu ye she de visiter la montagne et, arrivant au sommet, de négocier la répartition de l’héritage. Lorsqu’ils furent parvenus au sommet, Sumati profita que son demi-frère eût un moment d’inattention pour le précipiter dans le vide. Il fit tomber ensuite un rocher sur le corps de Xiu ye she afin de s’assurer de sa mort.

Le Bouddha acheva là son histoire, puis s’adressa de nouveau à Sariputra :
« Sariputra, sais-tu qui était ce père fortuné ? En vérité, il s’agissait de celui qui, dans ma vie actuelle, est mon père. Quant à Sumati, c’était le nom que je portais alors. Enfin, celui qui, aujourd’hui, se nomme Devadatta , était appelé autrefois Xiu ye she.
Sariputra, je tuai donc mon frère par le passé, à cause seulement de ma cupidité. L’enfer durant un temps infini fut le prix de ce mauvais karma. J’y fus brûlé et chaque mouvement au sein d’une montagne de métal était un coup de poignard qui déchirait ma chair. Alors qu’aujourd’hui je suis devenu Bouddha, une ombre de ce mauvais fruit karmique demeure encore qui m’oblige à rembourser cette dette karmique. C’est pourquoi je passai récemment près de la montagne Grdhrakuta. Devadatta était quant à lui situé dans ses hauteurs. De là, il fit basculer sur moi une énorme pierre. L’esprit de la montagne me protégea. Pour autant, un éclat de la pierre frappant le sol vint heurter mon pouce, qui se mit légèrement à saigner.
Tout ceci arriva parce que j’avais jadis assassiné mon frère, pour le seul amour de l’argent, parce que j’avais jeté sur lui la pierre qui lui donna la mort. A cause de cela, j’allai en enfer où je fus maintes fois poignardé par les dents acérées de la montagne de métal. Toutefois, les conditions nécessaires sont à présent trop faibles pour que le karma qu’elles engendrent soit davantage qu’un peu de sang écoulé d’un pouce.
Le karma ne disparaît pas : tout demeure présent. C’est pourquoi il est impératif d’être très vigilant sur ce que nous avons semé, sur ce que nous formons actuellement et sur les fruits que nous récolterons, afin de nous ne commettions pas de fautes par la pensée, la parole et l’action. Je suis devenu Bouddha, le plus précieux des Trois Mondes, et là, à proximité de la fontaine du palais du roi Anavatapta, j’ai voulu vous enseigner cette histoire.
Sariputra, vois-tu, je suis Bouddha car il n’est plus en moi un seul karma négatif et que je dispose en moi de tous les mérites nécessaires. Mon enseignement s’étend aux dieux célestes, aux dragons, aux esprits, aux rois, aux ministres, et à tous les êtres sensibles. Pour autant, je ne peux échapper aux exactions que j’ai commises par le passé. Prends donc en considération les gens ordinaires pour lesquels les fruits de la libération ne sont pas encore apparus.
Sariputra, enseigne auprès de tous les êtres sensibles cet exemple que j’ai partagé avec toi, afin que tous fassent un sage usage de leur pensée, de leur parole et de leur faculté d’agir. Il ne faut pas laisser une mauvaise pensée générer de graves erreurs et enfermer ensuite l’esprit dans les affres du regret. »

Lorsque le Bouddha eut achevé son sermon, les cinq cents arhats ainsi que le roi, les dieux célestes et tous les êtres invisibles qui l’écoutaient, éprouvèrent une grande joie et s’engagèrent à suivre ce qui leur avait été enseigné.